L’équilibre de Henri Girard
198 pages
eBook : 8,99 €
4e de couverture
Dans ce recueil rôdent la mélancolie, le doute, l’absurde, la dérision. On s’y laisse promener en équilibre sur un fil. L’auteur en bon funambule tient fermement le balancier entre ses mains. Ses nouvelles frôlent souvent le non-sens, mais ne manquent pas pour autant de sens profond.
L’humour, à peine esquissé ou franchement décapant, surgit toujours à point nommé et nous empêche de basculer dans la morosité.
Les plus de ce recueil de 20 nouvelles
• De l’humour
• De l’impertinence
• De la belle écriture
Interview
Qu’est-ce qui vous pousse à écrire ?
J’écris pour tenter de donner vie aux mots que je ne sais pas dire.
Pourquoi avoir écrit ce livre ?
Par défi personnel, n’ayant jamais auparavant écrit de recueil de nouvelles.
Comment vous en est venue l’idée ?
Par hasard, en retrouvant dans un des tiroirs de mon ordinateur des textes oubliés, plus ou moins ébauchés, émaillés de notes éparses. Ils m’inspirèrent. Ce fut un déclic. Ils correspondaient à des sujets et thèmes qui me touchaient intimement, à mon envie d’évasion hors des entiers battus, à mon humeur vagabonde. Je les repris, les triturai, les ravaudai, les bonifiai. Je parachevai cet étrange puzzle avec de nouvelles pièces qui s’inséraient pile-poil parmi les autres. Vive le hasard !
Premières pages
Naufrage
« À l’instant où j’écris, il y a dans la nuit, quelqu’un qui disparaît dans quelqu’un qui jouit. »
Phrase absolue, pense-t-il, et qui m’a condamné à la stérilité, à la page désespérément blanche. Cinq ans déjà qu’il l’a écrite. Sur une simple feuille volante, au stylo. C’était une nuit. Une nuit de solitude, d’insomnie. Il s’était relevé, s’était assis à son bureau. Les premiers mots avaient jailli. « À l’instant ou j’écris, il y a dans la nuit. » Un alexandrin. Pur hasard. Immédiatement les autres : « Quelqu’un qui disparaît dans quelqu’un qui jouit. » Encore douze pieds si l’on opte pour la diérèse et prononce « jou-it ». Hasard toujours. Pour la rime, c’est comme c’est. Nuit pour jouit. Il faut faire avec parce qu’impossible d’y changer quoi que ce soit. Mais surtout, plus rien après. Aridité absolue. Plus d’inspiration.
Aujourd’hui : texte intouchable, indestructible, gravé dans sa tête. De temps à autre il tombe dessus, le relit. Décidément, tout est dit qui le concerne. Rien à rajouter. Mais ce sentiment de frustration et d’impuissance. Cinq ans. Cinq ans qu’il est bloqué. Incapacité absolue d’écrire. La suite ou autre chose. Non, rien. Même pas une lettre à sa mère. Parfois il pense que « sa phrase » est trop belle pour lui. À lui inaccessible. Cette nuit-là, son inspiration avait tutoyé la perfection, la concision, la vérité, l’exactitude, l’indicible. Les mots avaient afflué. Chacun au bon moment, au bon endroit. En quelques secondes, son œuvre était achevée. Définitive. Vertigineuse. Ses deux lignes valaient des milliards de pages.
Comprendre ? Comprendre pourquoi. Bien sûr. Il a essayé. Il essaie encore. Il croit qu’il a trouvé. Enfin, qu’il a des pistes. Mais tout ceci ne change rien. Il ne peut plus écrire. Il a fini. Il est fini. Il est mort. Tué par sa phrase. Anéanti par ses propres mots. Oui, la mort. C’est ce qu’il reste quand on ne peut plus rien écrire.
Cela pourra paraître incroyable, mais il a été tenté de faire publier sa phrase.
Un « livre » dont le titre aurait été À l’instant où j’écris, il y a dans la nuit, quelqu’un qui disparaît dans quelqu’un qui jouit.
Et le texte : « À l’instant où j’écris, il y a dans la nuit, quelqu’un qui disparaît dans quelqu’un qui jouit. » Peut-être suivi de points de suspension.
On en parle
Article dans le nouveau dévorant du Clec (12/5/21
On en parle dans la vie du rail
J’aime les nouvelles, genre littéraire trop rare en France. Textes courts à la chute souvent coup de poing.
Ici, l’auteur nous invite à entrer dans différents univers. La folie, l’absurde, la nostalgie, la drôlerie.
Il nous offre la possibilité de vivre différents sentiments : sourire, émotion, rire…et réflexion.
Je soupçonne l’auteur d’être un amoureux des mots, un amoureux de la langue avec son écriture simple et toujours percutante.
Il s’agit d’un recueil hétéroclite. Certaines nouvelles vous parleront, d’autres peut-être un peu moins.
Peu importe, par son style, son écriture toujours ciselée, son rythme, ses atmosphères, ce recueil est un véritable bijou.
Merci pour ce très beau commentaire qui donne du sens à ce que nous faisons.
Un ouvrage d’Henri Girard est toujours un voyage, tant son univers est riche de rencontres, parfois improbables.
Une fois encore, et pour notre plus grand bonheur, il tient sa promesse. De nouvelle en nouvelle, l’auteur nous emporte, nous transporte… Du rire, souvent ; de l’émotion, toujours, et un je ne sais quoi de gravité empreint de mélancolie. Qui nous déstabilise un peu. Le passage du « il » de Naufrage, au « je » de Le prix Nobel de ma paix, ne peut nous laisser indifférents. L’écriture se fait « antalgique ». En ce qui me concerne ces deux nouvelles m’ont beaucoup émue.
Enfin nous rentrons dans la danse. Nous sommes entrainés, irrésistiblement, dans une farandole dans laquelle nous rencontrons Adolphe dit Le Bouffi, Virginy et Paulo, Loulou Debavière et j’en passe… qui vont rejoindre la déjà très riche galerie de personnages « Girardesques », ces personnages que j’aime tant, complexes, complets, drôles ou émouvants, les deux à la fois bien souvent. Angelbert, le héros de Jubilé (mon « chouchou » à vrai dire) n’est pas loin, et je pense, je suis certaine, qu’il les adoptera.
L’équilibre… au risque de mettre l’auteur mal à l’aise, je serais tentée de dire que l’objectif est atteint. En effet, l’écriture d’Henri Girard est un tout. On ne peut dissocier le talent du raconteur, du créateur d’histoires et son amour, son goût des mots. Le fond me séduit, la forme me ravit. Chaque mot semble, est, à sa place, celui-là, et pas un autre. L’écriture est mûrie, réfléchie. L’équilibre n’est pas toujours aisé… Mais Henri Girard l’a trouvé.
La couverture ? Elle est la parfaite métaphore du recueil ; une couverture que n’aurait certainement pas reniée le grand Ionesco, à l’image des incartades que s’offre l’auteur en « Absurdie ».
Mais pas seulement.
Du naufrage à l’équilibre…
Dernier titre de l’ouvrage, l’équilibre n’est-il pas en fin de compte ce que l’on cherche tous, que l’on soit rhinocéros ou pas…
Ch Angano
Voici un magnifique commentaire. De quoi ravir de plaisir l’auteur et son éditeur !
J’ai adoré la lecture de ces superbes nouvelles aux chutes si bien rendues , très originales, finement écrites et riches en émotions. L’auteur manie avec adresse un humour souvent décapant, percutant, omniprésent.
Son style particulier et son écriture incisive et saisissante, très efficaces accrochent le lecteur et provoquent des émotions diverses : le rire ou le sourire, l’étonnement , la tristesse, sans oublier la réflexion, dans une ambiance parfois absurde, ou de folie.
Un remarquable ouvrage qui interpelle.
Merci pour ce beau commentaire !